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Indemnité inflation pour les employeurs, comment ça marche ?

Date de publication : 22.12.21

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Amélie LEPORT

Ça y est, l’indemnité inflation est devenue effective. Son principe figure désormais à l’article 13 de la loi n°2021-1549 du 1er décembre 2021 tandis que ses modalités d’application ont été précisées par décret n° 2021-1623 du 11 décembre 2021 et par un questions-réponses publié le 2 décembre 2021 au BOSS (à valeur opposable).

Si les grandes lignes du dispositif annoncées dès octobre 2021 restent les mêmes, l’administration a parfois sacrifié sa cohérence par souci de simplifier sa gestion par les employeurs débiteurs de l’obligation. Merci donc à nos énarques d’avoir fait preuve de pragmatisme – une fois n’est pas coutume – même si certains détails restent sources de complexité ou d’interrogation.

Quels bénéficiaires ?

Cette aide exceptionnelle a vocation à bénéficier à toute personne âgée d’au moins 16 ans, résidant régulièrement en France et disposant de ressources limitées.

Si de nombreux publics correspondant à cette définition sont listés dans le décret d’application (notamment divers allocataires de prestations sociales, les retraités, les indépendants, etc…), nous nous focaliserons ici sur le public des salariés, pour lesquels le versement doit en principe être opéré par les employeurs.

Pour vérifier l’éligibilité de leurs salariés, les employeurs doivent donc vérifier si les conditions suivantes sont remplies :

  • Être âgé d’au moins 16 ans au 31 octobre 2021 ;
  • Avoir été résident français au mois d’octobre 2021 ;
  • Avoir eu une relation de travail avec l’entreprise au mois d’octobre 2021 ;
  • Avoir perçu une rémunération inférieure à un certain plafond.

Si la condition d’âge pose peu de difficultés, examinons les autres.

Condition de résidence

Précisons qu’il s’agit d’une résidence en France métropolitaine ou dans certaines collectivités d’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Mayotte et Saint-Pierre et Miquelon). Selon l’administration, cette condition peut être considérée comme remplie par les personnes soumises au prélèvement à la source ou dont les revenus d’activité ont été soumis à la CSG, critère apprécié sur tout ou partie du mois d’octobre 2021. Pour le cas particulier des travailleurs transfrontaliers sans revenu en France, ceux-ci devraient percevoir l’indemnité directement de l’administration fiscale.

Condition d’emploi en octobre 2021

Il s’agit de tout salarié ou alternant employé au cours d’octobre 2021 (hors salariés des particuliers employeurs faisant l’objet d’un traitement spécifique), et ce peu important la durée d’emploi sur ce mois. Il ne doit pas être tenu compte des absences sur tout ou partie du mois (sauf absence pour motif de congé parental total sur la totalité du mois), ni des sorties au cours du mois d’octobre ou après.

En outre, l’employeur a été désigné pour verser l’indemnité à des publics supplémentaires :

  • certains mandataires sociaux dits « assimilés salariés » rémunérés au mois d’octobre 2021,
  • les stagiaires liés par une convention de stage au mois d’octobre 2021 dont la gratification est supérieure au montant minimal légal,
  • les anciens salariés ayant perçu de l’entreprise un avantage de pré-retraite en octobre 2021,
  • les travailleurs handicapés en ESAT.

Quelques cas particuliers supplémentaires sont prévus par l’administration.

Condition de plafond de ressources

Celui-ci a été fixé à 26 000 euros bruts sur la période de référence du 1er janvier au 31 octobre 2021. Ce plafond est une valeur absolue qui est identique pour les temps partiels et les temps plein et ne tient pas compte des absences (indemnisées ou non) durant cette période.

Il doit en revanche être proratisé pour les personnes qui n’auraient pas été employées sur toute la période de référence à due proportion de la période non travaillée, avec un plancher de 2 600 euros.

Pour apprécier l’atteinte du plafond, il est doit être tenu compte des rémunérations brutes assujetties à cotisations de sécurité au sens de l’article L.242-1 CSS perçues au titre de la période de référence (des précisions sont apportées pour traiter certains cas particuliers). Petite simplicité accordée aux employeurs, chacun d’entre eux peut ne tenir compte que du revenu qu’il verse.

A noter que certains revenus sont expressément exclus :

  • Les revenus de remplacement (en ce y compris les IJSS et les indemnités d’activité partielle en deçà de 3,15 SMIC) ;
  • Les indemnités de congés payés lorsqu’elles sont versées par une caisse de congés payés ;
  • Les éléments de rémunération exonérés de charges sociales (telle PEPA) ;
  • Les versements de salaire postérieurs à la période d’emploi, hors décalage habituel de paie.

Quelles modalités de versement ?

Principe

L’employeur débiteur de l’obligation est celui qui a employé les personnes éligibles au cours du mois d’octobre 2021. En principe, le versement doit être automatique (sans nécessité d’intervention du salarié) mais par exception dans certains cas, le versement ne s’effectue que sur demande du salarié (en son absence, l’entreprise ne fait rien). La répartition des bénéficiaires éligibles entre ces deux catégories n’est pas des plus claires.

Selon nous, les bénéficiaires relevant de l’exception devraient limitativement être les suivants :

  • Salarié en CDD de moins d’1 mois et avec une durée de travail cumulée inférieure à 20h au mois d’octobre 2021 (ou 3 jours calendaires lorsque le contrat ne prévoit pas de durée horaire).
  • Journalistes pigistes ;
  • Intermittents et techniciens du spectacle ;
  • Stagiaires éligibles ;
  • Collaborateurs occasionnels du service public.

Dans tous les autres cas, le versement devrait donc être automatique. Toutefois, si un salarié considère qu’il est éligible à un autre titre (activité indépendante, particulier employeur par exemple pour lesquels le versement est effectué par l’URSSAF) ou qu’il n’est pas éligible, il est tenu d’en informer son employeur pour que celui-ci bloque son versement. Attention, à défaut d’avoir reçu une telle information l’employeur est tenu de payer l’indemnité.

Cas particulier des salariés multi-employeurs

Il s’agit d’éviter ici le risque de double paiement. Pour ce faire, des règles complexes de priorité entre employeurs sont prévues par les textes pour permettre au salarié d’identifier son employeur principal (des règles identiques sont prévues pour les mandataires sociaux). C’est le salarié qui a la charge d’alerter tous ses autres employeurs qu’il n’est pas nécessaire de procéder au versement. Si cette information ne leur parvient pas et que les bénéficiaires sont éligibles au versement automatique, les employeurs concernés doivent verser l’indemnité.

Quelle indemnité ?

Il s’agit d’une somme forfaitaire de 100 euros, versée une seule fois par bénéficiaire. Elle est exonérée de charges sociales et d’impôt sur le revenu et ne peut être prise en compte pour l’éligibilité et le calcul des prestations sociales.

L’aide peut être versée dès le mois de décembre et au plus tard le 28 février 2022. Attention pour les entreprises en décalage de paie, celles-ci ne dérogent pas au principe.

Si des personnes s’estimant éligibles n’ont pas perçu l’aide à cette date, elles peuvent faire une demande de versement à leur employeur. Sous réserve de vérifier leur éligibilité, celui-ci doit alors leur verser l’indemnité dans les 30 jours de la demande.

Cette indemnité doit apparaître sur le bulletin de paie sous le libellé « indemnité inflation- aide exceptionnelle de l’Etat » ou « indemnité inflation » et faire l’objet d’une déclaration en DSN.

modalités de versement de l'indemnité inflation

Quel remboursement par l’Etat et quel contrôle ?

Le remboursement

Les sommes versées au personnel sont déduites des sommes dues aux organismes de recouvrement au titre de la plus prochaine échéance DSN suivant le paiement et après application de toute autre exonération totale ou partielle. En cas d’excédent (les sommes à rembourser excèdent le montant des charges dues), celui-ci est imputé sur les échéances suivantes ou fait l’objet d’un remboursement par l’URSSAF.

Les régularisations et contrôles

Des contrôles peuvent être opérés sur les sommes versées par les employeurs par l’URSSAF afin de vérifier que les sommes déduites n’excèdent pas les indemnités versées à bon droit aux salariés éligibles.

A noter que les textes prévoient expressément que la responsabilité de l’entreprise ne pourra pas être engagée si elle a versé l’aide à un salarié ne remplissant pas la condition de revenu ou également éligible à un autre titre lorsque le salarié ne l’a pas informé de sa situation.

La régularisation des indus s’effectuera directement entre les bénéficiaires et l’administration fiscale.

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A propos de L’auteur

Amélie LEPORT

Juriste conseil social

Amélie est manager en conseil social au sein d’In Extenso, elle travaille depuis 12 ans dans le domaine du droit du travail et de la protection sociale. Elle a exercé ces spécialités à la fois en entreprise et en tant qu’avocate.

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