Article, Infographie
Difficultés financières des restaurants traditionnels et solutions de redressement
Date de publication : 26.09.24
Depuis la crise sanitaire, le secteur de la restauration traditionnelle en France est confronté à une situation économique complexe. Hausse des coûts, baisse de fréquentation, nouvelles habitudes de consommation : autant de facteurs qui mettent en péril la rentabilité des établissements.
L’étude menée en septembre 2024 par In Extenso, leader français de l’expertise-comptable, et Atometrics, spécialiste de l’analyse de données économiques, s’appuie sur des bases de données publiques pour déterminer l’évolution des défaillances d’entreprises sur la période de janvier à août 2024. Ce baromètre trimestriel fournit des éclairages par régions et secteurs d’activité.
Défaillances en France
Les politiques de soutien économique mises en place par l’État pendant la pandémie de COVID-19, comme les Prêts Garantis par l’État (PGE), ont entrainé une réduction significative des défaillances d’entreprises. En 2019, avant la crise sanitaire, 72 000 établissements avaient fait faillite sur un an, tous secteurs confondus. Ce chiffre est tombé à 42 000 en 2021.
Un effet rattrapage des défaillances d’entreprises s’est opéré depuis, avec le retrait progressif des aides de l’État, une forte inflation et une baisse de la consommation touchant une grand nombre de secteurs d’activité.
Depuis le début de l’année, on dénombre 66 185 défaillances d’établissements, soit une augmentation de 21,8% par rapport à 2023. L’hébergement et la restauration, d’une part, et la construction, d’autre part, sont les secteurs d’activité les plus en difficulté avec des taux de défaillances¹ respectifs de 4,5% et 4,4%.
Défaillances des acteurs de la restauration traditionnelle
Après une forte augmentation en 2022 et 2023, les défaillances de restaurants traditionnels semblent avoir atteint un plateau haut en 2024. Leur nombre dépasse désormais le niveau pré-COVID même s’il reste inférieur à celui de 2014, année particulièrement difficile pour le secteur.
Les principales causes des difficultés financières dans la restauration
Flambée des coûts de fonctionnement
En 2022, l’inflation en France a atteint des niveaux records, touchant particulièrement les matières premières alimentaires. Viande, poisson, légumes et produits laitiers ont vu leur prix augmenter de 12,1% en 2022 et 7,7% en 2023. D’après Food Service Vision², les prix sur les marchés de la consommation hors domicile ont connu une hausse cumulée de 30% entre 2022 et 2023. De la même manière, les coûts de l’énergie ont fortement augmenté, impactant directement les charges d’exploitation des restaurants. Le chauffage des salles, la cuisson des aliments et l’éclairage des établissements représentent une part importante de leurs coûts fixes. Cette hausse des charges énergétiques a pesé sur les marges.
Augmentation de la masse salariale
Les salaires du secteur ont augmenté, tirés par la hausse du SMIC et les difficultés de recrutement. La rémunération des heures supplémentaires, qui étaient souvent non payées ou mal encadrées dans certains établissements, est désormais mieux régulée. Les coûts additionnels pour les employeurs sont significatifs et réduisent les marges et la trésorerie des restaurants.
Baisse de la fréquentation et nouvelles habitudes de consommation
Les comportements des consommateurs ont changé depuis la pandémie. La livraison à domicile et la restauration rapide sont devenues des alternatives populaires. Le recours au télétravail et la baisse du pouvoir d’achat en 2023 et 2024 ont également contribué à cette tendance. Le vendredi voyait les restaurants se remplir pour le déjeuner ; c’est désormais un jour prisé des télétravailleurs et un manque-à-gagner pour de nombreux restaurateurs.
La restauration : un secteur à la rentabilité fragile
Les marges dans la restauration traditionnelle sont historiquement faibles, souvent entre 3 % et 5 % du chiffre d’affaires. Ce niveau de rentabilité rend les restaurants vulnérables aux fluctuations économiques. L’augmentation des coûts d’exploitation et la baisse de chiffre d’affaires, ont conduit des établissements à fonctionner à perte, plongeant les restaurateurs dans des situations financières critiques.
L’accès au crédit bancaire ou au financement externe est également devenu plus difficile, les banques se montrant réticentes à financer des secteurs jugés à risque tels que la restauration.
Conséquences : une hausse des redressements et liquidations judiciaires
Des flux de trésorerie faibles ne permettent plus de faire face aux obligations financières : fournisseurs, loyer, remboursement d’emprunt et très souvent d’un PGE. Nombre d’exploitants se retrouvent ainsi en état de cessation des paiements, synonyme d’une ouverture de procédure collective : redressement judiciaire ou liquidation judiciaire.
Dans le secteur de la restauration traditionnelle, 2 603 défaillances d’établissements ont été enregistrées entre janvier et août 2024 : un nombre en augmentation de 3,4% par rapport à la même période en 2023.
Même si le taux de défaillances dans la restauration est structurellement élevé, il s’établit à 7,3% à fin août, soit 6 point de plus que la moyenne française tous secteurs confondus. Les situations en régions sont néanmoins disparates avec des taux allant de 11,1% dans le Centre-Val de Loire à 5,3% en Corse.
Les petites structures, souvent familiales, qui n’avaient pas les réserves financières suffisantes pour faire face aux chocs économiques successifs, ont été particulièrement touchées.
Les perspectives pour le secteur de la restauration ne montrent pas de signes d’amélioration à court terme. Si les fondamentaux économiques restent inchangés, on peut supposer que la situation ne se dégradera pas davantage mais se stabilisera sur un plateau.
De nombreux restaurateurs feront face à des difficultés financières, avec un risque élevé de défaillance de leur entreprise.
Quelles solutions pour le redressement des restaurants ?
Malgré ce contexte difficile, certaines stratégies peuvent permettre aux restaurants traditionnels de redresser la barre et d’éviter la fermeture. Quelles solutions pourraient être envisagées pour améliorer la rentabilité et la viabilité des établissements ?
Réduction des coûts et optimisation des ressources
Pour retrouver des marges de manœuvre financières, les restaurateurs peuvent identifier les postes de dépenses à optimiser. Cela passe par une meilleure gestion des stocks pour éviter le gaspillage alimentaire, l’optimisation des horaires d’ouverture afin de réduire les coûts énergétiques, et une rationalisation de la carte pour se concentrer sur les plats les plus rentables.
Certains restaurants choisissent de négocier avec leurs fournisseurs pour obtenir des tarifs plus avantageux, ou de se tourner vers des producteurs locaux, dont les circuits courts permettent de réduire les frais de transport et d’approvisionnement.
La mise en place d’un tableau de bord mensuel permet de suivre précisément l’équilibre entre chiffre d’affaires et charges d’exploitation et de quantifier les résultats des actions entreprises.
Renégociation de contrats et allégement de charges
Les restaurateurs peuvent renégocier leurs contrats de bail et demander des aménagements de paiement auprès de leurs créanciers pour alléger la pression financière. Certains propriétaires peuvent accepter des baisses de loyer temporaires pour éviter que leur locataire ne mette la clé sous la porte. Les procédures de prévention mandat ad hoc et conciliation sont des dispositifs confidentiels de négociation avec des tiers (bailleur, banque…) et ont prouvé leur efficacité.
Une autre piste pour préserver sa trésorerie : se tourner vers les Commissions départementales des Chefs de Services Financiers (CCSF) pour demander des délais de paiement des dettes fiscales et sociales.
Diversification de l’offre et adaptation au marché
Pour pallier la baisse de la fréquentation en salle, de nombreux restaurateurs choisissent de diversifier leur offre en proposant des services de livraison ou de vente à emporter. La création de menus spécifiques pour la livraison permet de répondre aux nouvelles attentes des consommateurs tout en augmentant les sources de revenus.
D’autres stratégies incluent la mise en place d’offres de restauration à thème, de soirées événementielles ou la collaboration avec des producteurs locaux pour attirer une nouvelle clientèle. Les restaurants qui innovent et s’adaptent aux nouvelles tendances de consommation, comme le bio, le véganisme ou les produits sans gluten, renforcent leur compétitivité sur un marché en pleine transformation.
Dans le contexte actuel, incertain et complexe, l’enjeu principal des restaurateurs, et des dirigeants dans leur ensemble, doit être l’anticipation et la prévention des difficultés.
Un accompagnement sur-mesure pour les dirigeants de TPE et PME
In Extenso accompagne les TPE et PME dans la prévention et le traitement des difficultés. Grâce à leur expertises techniques et sectorielles, les experts-comptables, juristes, avocats et consultants d’In Extenso guident les dirigeants et leur préconisent des solutions adaptées à la situation de leur entreprise.
Notre partenaire Atometrics, spécialiste de la production de données et d’analyse, nous fournit des informations économiques locales précises et actualisées sur les différents secteurs de nos clients TPE et PME.
¹ Taux de défaillances : nombre de défaillances sur les 3 dernières années par rapport au nombre d’établissements actifs, observé en fin de période.
² Source : Food Service Vision, Base des tarifs généraux de 7 distributeurs
A propos de L'auteur
Guillaume Vigneron
Expert-comptable Associé
Spécialiste secteur CHR (Cafés Hôtels Restaurants) et Commerce en franchise au sein du Groupe In Extenso
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