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Droit des contrats et coronavirus : paiement des loyers et des factures

Date de publication : 24.03.20

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Face à l’épidémie de Coronavirus COVID-19, les mesures visant à limiter la propagation du virus ont conduit à l’obligation de fermeture de nombreuses entreprises et cette situation inédite entraîne bien souvent pour celles-ci des difficultés de satisfaire à leurs obligations contractuelles, notamment le paiement des loyers.

Recommandations générales en matière contractuelle

Concernant la possibilité d’annuler des contrats ou d’étaler le paiement des loyers, les restitutions d’arrhes ou d’acomptes, les pénalités éventuellement applicables en matière contractuelle, nous vous invitons à suivre le raisonnement suivant qui reste en vigueur jusqu’à nouvel ordre du législateur pour des tempéraments :

  • Consultez les contrats en cause ainsi que les conditions générales de vente ou de prestations si elles sont séparées ; la lecture de ces documents vous permettra d’identifier si des dispositions spécifiques avaient été prévues.
  • Consultez les conditions d’annulation dans le contrat ainsi que les clauses d’imprévision si le contrat en contient.
  • A défaut, demandez-vous si les parties au contrat sont assurées pour bénéficier d’une assurance de couverture en cas d’annulation pour motif exceptionnel,

    A ce jour, la crise du COVID19 ne constitue pas nécessairement au plan juridique un cas de force majeure, sauf pour les contrats avec l’État depuis le discours de Bruno Le Maire en faveur des entreprises touchées par le Coronavirus, dans lequel le ministre de l’économie et des finances indiquait que « L’Etat considère le coronavirus comme un cas de force majeure pour les entreprises ». Il convient donc ici de distinguer entre force majeure dans le cadre de relations contractuelles purement privées et force majeure dans le cadre des marchés publics de l’État. En effet, le cas de force majeure s’entend d’un événement imprévisible au jour de la conclusion du contrat et irrésistible tant dans sa survenance (inévitable) que dans ses effets (insurmontables) empêchant de manière temporaire ou définitive l’exécution d’un contrat. Il convient par exemple de rappeler que la crise du H1N1 n’avait pas été juridiquement retenue comme cas de force majeure au plan juridique. Il y a donc lieu, à ce stade de faire une analyse au cas par cas des caractères inévitables et insurmontables au regard du contrat en cause et de ne pas faire d’analyse trop rapide. 
  • Dans le cas où la force majeure ne pourrait être démontrée, il y a lieu de faire application du mécanisme de l’imprévision (suite à l’ordonnance du 10 février 2016, attention donc à la date d’application selon les contrats). Cette ordonnance a introduit en droit français la procédure permettant à un cocontractant de solliciter (et non d’imposer) la révision amiable d’un contrat dès lors que survient un changement de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrat et rendant son exécution excessivement onéreuse. A noter : ce mécanisme de l’imprévision peut être exclu volontairement du contrat pour les parties. 
  • En pratique pour les contrats conclus ou renouvelés avant le 1er octobre 2016, ce mécanisme ne fonctionne pas et seule une négociation spontanée des parties est envisageable ; 
  • Pour les contrats conclus ou renouvelés après le 1er octobre 2016, chaque partie peut solliciter l’autre partie pour demander la révision ou sa résolution sauf si l’imprévision est exclue du contrat (bien lire les clauses du contrat).

A lire : Le recours au mandat ad hoc pour maintenir la continuité d’exploitation

Mesures exceptionnelles en matière de droit des affaires

Suite à l’adresse aux Français du Président de la République du 16 mars 2020, certains contrats pourraient voir l’exécution d’une partie des obligations qu’ils comprennent suspendues : Les factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que les loyers devront être suspendus.

Dans l’attente de mesures de mise en œuvre de cette déclaration et d’une modification de la réglementation applicable, nous vous rappelons que dans le cadre d’un bail commercial, le non-paiement du loyer à la date convenue constitue un incident de paiement.

⚠ Attention : dès qu’il y a incident de paiement, le bailleur peut :

  • intenter une action contre le locataire pour obtenir le paiement des loyers dus,
  • intenter une action en résiliation du contrat de bail,
  • appliquer la clause résolutoire figurant le cas échéant dans le contrat de bail,
  • refuser le renouvellement du contrat de bail commercial, sans avoir à verser d’indemnité d’éviction, en cas de motif grave et légitime,

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a été publiée au Journal Officiel le 24 mars, elle est d’application immédiate.

Dans ce cadre, le Parlement a habilité le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance.

Un projet d’ordonnance relatif notamment aux modalités d’étalement du paiement des loyers et des factures d’eau et d’électricité de certaines entreprises est en préparation afin de modifier le Code de commerce suite au Covid 19.

L’analyse des amendements adoptés par la commission des Lois nous permet déjà, avant même que l’ordonnance soit publiée au Journal Officiel, de savoir que :

  • L’ordonnance permettrait le report intégral et/ou l’étalement  (et non la suspension comme initialement annoncé par le Gouvernement) du paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité des professionnels visés.
  • Les très petites entreprises qui pourront le cas échéant bénéficier de ce dispositif seront les « microentreprises, au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique« , c’est à dire les entreprises occupant moins de 10 personnes, et qui ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros.

⚠ Attention : il ne s’agit pas des micro-entreprises au sens de l’article D123-200 du Code de commerce (total du bilan à 350 000 euros, montant net du chiffre d’affaires à 700 000 euros et nombre moyen de salariés employés au cours de l’exercice à 10), ni du régime fiscal de la micro-entreprise.

A propos de L'auteur

Pierre LAMANT

Directeur Juridique chez In Extenso

Directeur juridique au sein d’In Extenso Sud-Ouest depuis 7 ans et fort d’une expérience en droit des affaires depuis 20 ans, Pierre intervient en tant que conseil juridique en droit des affaires incluant l’organisation juridique, le droit des sociétés, les contrats commerciaux et l’ensemble des problématiques liées aux acquisitions et fusions.

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Till Jouaux

Référent juridique national

Till est Responsable National Juridique au sein du groupe In Extenso. Il a pour mission d’animer le métier juridique auquel participent près de 300 collaborateurs dans toute la France

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